Adolphe, me disait-elle, pourquoi vous acharnez-vous sur moi? Quel est mon crime? De vous aimer, de ne pouvoir exister sans vous. Par quelle pitié bizarre n’osez-vous rompre un lien qui vous pèse, et déchirez-vous l’être malheureux près de qui votre pitié vous retient? Pourquoi me refusez-vous le triste plaisir de vous croire au moins généreux? Pourquoi vous montrez-vous furieux et faible? L’idée de ma douleur vous poursuit, et le spectacle de cette douleur ne peut vous arrêter! Qu’exigez-vous? Que je vous quitte? Ne voyez-vous pas que je n’en ai pas la force? Ah! c’est à vous, qui n’aimez pas, c’est à vous à la trouver, cette force, dans ce coeur lassé de moi, que tant d’amour ne saurait désarmer. Vous ne me la donnerez pas, vous me ferez languir dans les larmes, vous me ferez mourir à vos pieds.» — «Dites un mot, écrivait-elle ailleurs. Est-il un pays où je ne vous suive? Est-il une retraite où je ne me cache pour vivre auprès de vous, sans être un fardeau dans votre vie? Mais non, vous ne le voulez pas. Tous les projets que je propose, timide et tremblante, car vous m’avez glacée d’effroi, vous les repoussez avec impatience. Ce que j’obtiens de mieux, c’est votre silence. Tant de dureté ne convient pas à votre caractère. Vous êtes bon; vos actions sont nobles et dévouées: mais quelles actions effaceraient vos paroles? Ces paroles acérées retentissent autour de moi: je les entends la nuit; elles me suivent, elle me dévorent, elles flétrissent tout ce que vous faites. Faut-il donc que je meure, Adolphe? Eh bien, vous serez content; elle mourra, cette pauvre créature que vous avez protégée, mais que vous frappez à coups redoublés. Elle mourra, cette importune Ellénore que vous ne pouvez supporter autour de vous, que vous regardez comme un obstacle, pour qui vous ne trouvez pas sur la terre une place qui ne vous fatigue; elle mourra: vous marcherez seul au milieu de cette foule à laquelle vous êtes impatient de vous mêler! Vous les connaîtrez, ces hommes que vous remerciez aujourd’hui d’être indifférents; et peut-être un jour, froissé par ces coeurs arides, vous regretterez ce coeur dont vous disposiez, qui vivait de votre affection, qui eût bravé mille périls pour votre défense, et que vous ne daignez plus récompenser d’un regard.
阿道夫,你为什么对我动怒?我犯了什么错?因为爱你,还是因为失去你,我无法活?出于哪种令人费解的同情你要断掉我们的关系、你的负担?你对这个不幸的人保留了同情为什么现在要彻底伤透她?为什么你连我相信你至少还保有仁慈的可怜想法都要粉碎?为什么你表现得既暴躁又软弱?我的痛苦你没有忘记,但这场痛苦的悲剧并不能使你停手。你有什么要求呢?要我离开吗?你看不到我已经没力气了吗?你可以不爱了,也可以在我麻木的心里唤回它,足够的爱会使它平复。但你是不会给我的,你要我在眼泪里受尽折磨,要我死在你的脚下。告诉我,这里是否是我可以跟随你的地方?是否是余生可以在你身旁渡过又不会成为你包袱的藏身之所?不。你不喜欢这里。所有想法我都小心翼翼、战战兢兢地向你提出,生怕你发作或者不耐烦地回绝我。你的沉默是我能得到的最好的回应。可是我这样忍耐也无法适应你的脾气。你是善良的,你的行为表现出高贵和忠诚。但你哪些行为可以让我忘记那些缠绕耳际的尖利的言语?每晚我听到它们,尾随我,噬咬我,把你所做的一切变为枯槁。要我去死么,阿道夫?我会高兴的。她会死。这个你保护过又给予双重打击的可怜的人。她会死。这个不得不忍受的、讨厌的艾蕾诺,被你视作障碍,因为她使你在世上无法得到一个轻松的职位。她会死,你将孤独一人走在这群你迫不及待想融入的人群里。你认识他们,这些今天你感激于把你变得冷漠的人。也许有一天,你也会被这些冷漠的心所伤害。你将为你曾经拥有过的一颗心而懊悔。这颗心曾依靠你的眷恋而存活,为了保护你它抵御过无数的伤害。可是,你连一眼也不愿再看她了。(三一译)